Antécédents médicaux et responsabilité

Une femme de 37 ans consultait le Docteur X, chirurgien plasticien, pour bénéficier d’une liposuccion abdominale, laquelle, en l’absence de contre-indication, avait lieu trois semaines plus tard et se déroulait simplement.

Toutefois, à J+2, la patiente était victime de douleurs abdominales et de vomissements violents qui l’amenaient à se rendre aux urgences.

Le scanner abdomino-pelvien réalisé à cette occasion objectivait une perforation digestive grêlique avec pneumopéritoine et péritonite associés.

Une laparotomie exploratrice immédiatement réalisée permettait de confirmer la présence de deux perforations grêliques très proches l’une de l’autre, qui étaient traitées.

Lors du rétablissement de la continuité digestive un mois plus tard, l’opérateur constatait la présence de nombreuses adhérences péristomiales et intra-abdominales, ainsi qu’un kyste d’inclusion péritonéal de la fosse iliaque droite contenant un liquide citrin.

La patiente saisissait donc le juge des référés aux fins d’expertise, outre la condamnation du praticien au paiement d’une provision de 30 000 euros.

En annexe à son assignation, la patiente produisait une note technique établie par un médecin-conseil diplômé en réparation juridique du préjudice corporel, qui concluait qu’un geste maladroit du chirurgien lors des manoeuvres de lipoaspiration abdominale avait été à l’origine de la perforation par la canule d’aspiration du plan musculaire et des anses grêles sousjacentes, et qu’aucune autre cause ne pouvait être à l’origine de ces perforations digestives.

Toutefois, l’étude minutieuse du dossier médical de la patiente révélait des antécédents médicaux susceptibles d’avoir eu une incidence sur la constitution du dommage.

En effet, alors pourtant que tous les comptes rendus opératoires et d’hospitalisations indiquaient l’absence d’antécédents chirurgicaux chez cette jeune patiente, une fiche de renseignements remplie par cette dernière, avant l’intervention litigieuse, faisait état d’une conisation.

La défense du chirurgien consistant dès lors à valoir que l’intervention de conisation à laquelle la patiente s’était soumise par le passé, tout comme l’affection qui l’avait imposée, avait pu être à l’origine des adhérences péristomiales et intra-abdominales diagnostiquées lors du rétablissement de la continuité digestive.

Et donc que les actes de traction réalisés lors de la lipoaspiration abdominale avaient pu provoquer, en l’absence de tout geste fautif du chirurgien, la double perforation du grêle.

Le même argumentaire était invoqué s’agissant du kyste d’inclusion péritonéal, lequel pouvait parfaitement préexister à l’intervention de lipoaspiration, tout en étant masqué, par exemple, par une couche graisseuse, rendant ainsi l’atteinte du grêle inévitable…

Dans son ordonnance, le juge des référés va accueillir cette argumentation et rejeter la demande provisionnelle de la patiente en considérant que la faute du chirurgien, et conséquemment sa responsabilité, n’étaient pas démontrées.

Cette ordonnance ne met bien entendu pas un terme définitif à l’affaire puisque une expertise et, le cas échéant, une procédure devant le tribunal, vont avoir lieu.

Mais elle nous rappelle l’exigence, et la nécessité, de la tenue minutieuse du dossier médical, seule source de la preuve médico-légale.


Me Georges LACOEUILHE & Me Pierre-Henri LEBRUN – Avocats spécialisés dans la défense des praticiens du bloc