Le suivi post-opératoire constitue une étape cruciale dans le parcours de soin du patient. Au-delà de la simple surveillance médicale, il engage la responsabilité du praticien sur le plan juridique et conditionne directement la qualité de la récupération. Cet article revient sur un cas concret de complication post-chirurgicale, pour en tirer des enseignements pratiques à destination des médecins du bloc opératoire.
Un cas clinique révélateur : complication après chirurgie d’une épicondylite
Un patient de 52 ans, souffrant d’une épicondylite droite, est opéré en ambulatoire par le Dr X. À sa sortie, il reçoit des consignes post-opératoires écrites ainsi qu’un numéro d’urgence à contacter en cas de problème. Néanmoins, des complications surviennent dès la nuit suivant l’intervention.
Le patient ressent une douleur intense mais hésite à solliciter l’équipe médicale. Il décide d’attendre le lendemain pour se rendre aux urgences, où un diagnostic de syndrome des loges est posé. Il est alors transféré d’urgence vers un centre hospitalier universitaire pour subir une aponévrotomie.
Malgré plusieurs interventions chirurgicales ultérieures, le membre supérieur droit du patient est sauvé. Cependant, ce dernier considère ne pas avoir été suffisamment informé sur les complications possibles et reproche au chirurgien un défaut de prise en charge rapide.
Les conséquences médico-légales : information et suivi en question
Le patient engage une action en justice contre le chirurgien et l’anesthésiste, les accusant d’un manquement au devoir d’information et d’un défaut de suivi post-opératoire. Il soutient que l’aggravation de son état résulte d’un retard de prise en charge.
Selon Me Georges Lacoeuilhe, avocat spécialisé en défense des médecins, ce type de contentieux illustre la nécessité d’une traçabilité rigoureuse et d’une communication proactive avec le patient. La documentation médicale (comptes rendus opératoires, fiches de liaison, notes d’appel ou de téléconsultation) joue ici un rôle protecteur essentiel.
Leçons à retenir : comment prévenir ce type de situation ?
Ce cas met en lumière plusieurs leviers d’amélioration dans la gestion du suivi post-opératoire :
- Des instructions post-opératoires claires et accessibles
Remettre au patient un document écrit, rédigé en langage simple, détaillant les gestes à suivre, les signes d’alerte et les contacts d’urgence. - Un suivi organisé et anticipé
Programmer un appel ou une visite de contrôle dans les 24 à 48 heures suivant l’intervention, notamment en chirurgie ambulatoire, pour évaluer la douleur et détecter précocement les signes de complications. - Favoriser l’autonomie et la vigilance du patient
Encourager le patient à signaler tout symptôme anormal sans attendre, en levant ses hésitations à appeler un professionnel. - Informer sur les risques, même rares
L’information éclairée doit couvrir non seulement les risques fréquents, mais aussi les complications rares mais graves. Cette information doit être tracée dans le dossier médical.
Vers une culture du suivi actif
Renforcer la sécurité du patient implique une évolution des pratiques vers un suivi post-opératoire plus actif, incluant :
- Des protocoles de sortie structurés, intégrant les points de contact en cas d’urgence.
- Un recours plus systématique à la télémédecine pour les contrôles précoces.
- Une formation continue à la communication médicale, axée sur la pédagogie et l’écoute.
Le suivi post-opératoire ne se limite pas à la remise d’un document de sortie : il constitue un véritable temps médical, engageant sur les plans clinique, relationnel et juridique. Ce cas démontre que l’absence d’un lien de suivi structuré peut transformer une complication en contentieux. Mieux informer, mieux écouter et mieux anticiper : tels sont les piliers d’une relation de confiance durable entre patient et soignant.
Me Georges Lacoeuilhe – avocat associé du Cabinet Lacoeuilhe associés