« Nos pires cauchemars », le podcast sur la chirurgie urologique

« Mieux vaut prévenir que guérir ». Certains adages font appel à du bon sens. Il est pourtant en pratique très difficile dans nos sociétés occidentales de développer une médecine préventive efficace. La médecine préventive est la branche de la médecine consistant à donner des conseils d’hygiène au sens large (propreté, mais aussi diététique, encouragement à un sport ou une activité physique, ergonomie et manière de faire des efforts, prévention des conduites à risque…) ainsi qu’au dépistage de maladie.

En France, elle est dispensée par des médecins du travail, salariés, pour les fonctionnaires de l’État. Cette branche de la médecine a une image archaïque et n’est pas assurée par les cliniciens. Un patient remerciera d’ailleurs volontiers son chirurgien thoracique pour l’exérèse de son poumon cancéreux. En revanche, il oubliera son médecin traitant qui lui préconisait d’arrêter de fumer depuis 25 ans (sic).

Prévention en chirurgie : Réduire les erreurs médicales et la morbidité péri-opératoire

En chirurgie, la prévention a surtout pour objectif de réduire les erreurs médicales (check-list) et la morbidité péri-opératoire. On a coutume d’affirmer que « la complication est un effet de la simplicité mal acquise ». En se modernisant, l’urologie est passée de la chirurgie ouverte incisionnelle traditionnelle à la chirurgie endoscopique puis à la chirurgie laparoscopique mini-invasive et enfin à la chirurgie robotique.

Chaque nouvelle voie s’est accompagnée d’une décroissance des complications péri-opératoires (raccourcissement des durées opératoires, diminution de la durée d’hospitalisation, des séjours en réanimation, du recours à la transfusion sanguine).

💡 Les complications n’ont pas à être exclusivement perçues à travers le prisme de la sinistralité et l’aspect médico-légal que chacun peut craindre. La chirurgie demeure un métier d’artisan et elle est faite d’impondérables.

Éducation des chirurgiens : Gestion des complications pour la sécurité des patients

Les systèmes de santé des pays riches ne sont pas comparables entre eux mais on estime le coût des complications chirurgicales à 170 milliards de $ par an aux USA et le coût des ré-admissions via les urgences après chirurgie à 41 milliards de $ dont plus de la moitié en rapport avec des complications chirurgicales. En France, la chirurgie endoscopique de la prostate, banal au demeurant, est la première pourvoyeuse de réadmission chirurgicale après un séjour en urologie.

👉 Il est donc crucial d’éduquer les chirurgiens à parler de leurs complications (mineures ou majeures), à les répertorier objectivement en utilisant des outils validés et à les enregistrer prospectivement.

Les sociétés savantes nationales et européennes se sont emparées de ces sujets en promulguant des recommandations pour inciter les chirurgiens à reporter objectivement ces complications. De grands journaux scientifiques avec comité de lecture exigent désormais que soient utilisées les classifications (Clavien Dindo, critère de Martin).

Réunions de morbi-mortalité : pour un apprentissage continu

Parler des complications chirurgicales et organiser des réunions de morbi-mortalité sont deux pratiques fondamentales dans le domaine chirurgical. Elles revêtent une importance cruciale pour la qualité des soins prodigués aux patients, la formation des professionnels de santé et l’amélioration continue des pratiques chirurgicales.

  • Premièrement, discuter ouvertement des complications chirurgicales permet de favoriser la transparence et la confiance entre les membres de l’équipe médicale, mais aussi avec les patients et leurs familles. Reconnaître l’existence de complications est essentiel pour prendre des mesures correctives, prévenir de futures erreurs et garantir la sécurité des patients. Ignorer ou dissimuler les complications ne fait que compromettre la qualité des soins et nuire à la confiance du public dans le système de santé.
  • Deuxièmement, les réunions de morbi-mortalité offrent un espace structuré où les professionnels de santé peuvent examiner de manière approfondie les cas de complications ou de décès survenus lors d’interventions chirurgicales. Ces réunions sont des occasions précieuses pour analyser les causes des incidents, identifier les facteurs contributifs, et proposer des solutions d’amélioration. Elles favorisent également l’apprentissage par la rétroaction et encouragent une culture de responsabilité et d’amélioration continue au sein des équipes médicales.

Podcast d’urologie : démystifier les complications chirurgicales

Ainsi en lançant un nouveau podcast d’urologie avec le soutien institutionnel de Branchet, intitulé mes « pires cauchemars » ai-je décidé de mettre en lumière des situations compliquées, exceptionnelles, survenues entre les mains d’experts nationaux reconnus par l’association française d’urologie. L’objet de ce podcast est d’illustrer des cas particuliers à valeur éducative pour démystifier les complications chirurgicales et inciter les chirurgiens à en parler ouvertement au sein de leurs équipes pour mettre en place des mesures qui permettront d’optimiser leur gestion et réduire leur incidence au maximum.

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En conclusion, parler des complications chirurgicales et organiser des réunions de morbi-mortalité sont des pratiques essentielles pour garantir la sécurité, la qualité et l’efficacité des soins chirurgicaux. Elles favorisent la transparence, l’apprentissage continu et la responsabilité au sein des équipes médicales, et contribuent à l’amélioration constante des pratiques cliniques et des résultats des patients.

Professeur Morgan Rouprêt

Hôpital Pitié Salpétrière, Assistance Publique Hôpitaux de Paris Sorbonne Université

Branchet Chef de pôle Urologie


Références

Intraoperative Adverse Incident Classification (EAUiaiC) by the European Association of Urology ad hoc Complications Guidelines Panel. Biyani CS, Pecanka J, Rouprêt M, Jensen JB, Mitropoulos D.Eur Urol. 2020 May;77(5):601-610. doi: 10.1016/j.eururo.2019.11.015.

Validation of the Clavien-Dindo Grading System in Urology by the European Association of Urology Guidelines Ad Hoc Panel. Mitropoulos D, Artibani W, Biyani CS, Bjerggaard Jensen J, Rouprêt M, Truss M.Eur Urol Focus. 2018 Jul;4(4):608-613. doi: 10.1016/j.euf.2017.02.014.

Quality assessment of partial nephrectomy complications reporting using EAU standardised quality criteria. Mitropoulos D, Artibani W, Biyani CS, Bjerggaard Jensen J, Remzi M, Rouprêt M, Truss M.Eur Urol. 2014 Sep;66(3):522-6. doi: 10.1016/j.eururo.2014.02.004.

Reporting and grading of complications after urologic surgical procedures: an ad hoc EAU guidelines panel assessment and recommendations. Mitropoulos D, Artibani W, Graefen M, Remzi M, Rouprêt M, Truss M; European Association of Urology Guidelines Panel.Eur Urol. 2012 Feb;61(2):341-9. doi: 10.1016/j.eururo.2011.10.033.

Hospital Readmissions After Urological Surgical Procedures in France: A Nationwide Cohort Study over 3 Years.Manach Q, Rouprêt M, Reboul-Marty J, Drouin SJ, Guillot-Tantay C, Matillon X, Parra J, Mozer P, Bitker MO, Lefèvre JH, Phé V.Eur Urol Focus. 2018 Jul;4(4):621-627. doi: 10.1016/j.euf.2017.06.001.